Guide du propagandiste
Techniques de propagande
Voici quelques techniques de propagande issues du livre Petit traité de propagande à l’usage de ceux qui la subissent écrit par Étienne Augé F. accompagnées d’explications et d’exemples afin de bien comprendre comment elles peuvent être utilisées.
Blouses blanches et Galons
Certains titres ou grades nous poussent à accorder plus de crédibilité à certaines personnes. Qu’elles soient des personnalités connues, des personnes en position d’autorité ou étant perçues comme supérieures en terme de connaissance, nous sommes plus enclins à les croire et à leur obéir.
Pour exemple, prenons l’expérience de Milgram. Elle s’est déroulée en 1963 et portait sur la soumission à l’autorité. Des personnes s’étaient portées volontaires pour une expérience sur la mémoire. Le principe était simple, les sujets de l’expérience devaient faire mémoriser des associations de mots à d’autres personnes qui en fait étaient des complices. Si la personne échouait dans la mémorisation, les sujets de l’expérience devaient infliger des chocs électriques qui bien sûr étaient faux et seulement simulés par les complices. Étonnamment, 63% des sujets, sur la simple pression d’un homme portant une blouse blanche, infligèrent des chocs mortels. Cet exemple illustre bien comme un individu se soumet facilement à l’autorité d’un autre.
Un autre exemple plus récent de l’utilisation de cette technique de propagande se retrouve dans la stratégie de la compagnie Transcanada pour faire accepter aux Québécois le projet d’un pipeline afin d’acheminer le sable bitumineux de l’Alberta à travers le Canada en passant par le Québec. L’entreprise chercherait à mettre de son côté plusieurs universités québécoises en finançant leurs projets de recherche ainsi que plusieurs journalistes. De plus, Transcanada a dressé une liste de personnes influentes dans leur communauté et est prête à les payer pour qu'elles fassent la promotion du projet de pipeline. Cela montre bien comment le titre d’une personne peut pousser un individu à une méfiance moins grande.
L’effet boule de neige
C’est une caractéristique de l’être humain que de vouloir être comme les autres et de ne pas vouloir se sentir différent. Le pouvoir de la mode provient de ce comportement et c’est sur ce caractère humain que s’appuie souvent la publicité. Les individus ont fréquemment des réflexions telles que : « Si autant de personnes le croit, il doit dire la vérité » ou bien « J’ai moins de risque de me tromper si je fais comme tout le monde ».
L’expérience de Asch, qui a été maintes fois répétée dans diverses occasions, fait la démonstration de ce comportement humain. Il s’agit encore une fois d’un volontaire parmi plusieurs complices. Une question, à laquelle la réponse est évidente pour n’importe qui, est posée à l’auditoire. Les premiers participants, qui sont des complices de l’expérience, disent tous la mauvaise réponse. Plus du tiers des véritables sujets vont eux aussi choisir cette réponse, poussés par le désir de conformisme. De plus, 75% vont suivre les complices au moins une fois. Voici la preuve que l’être humain a tendance à faire comme les autres pour être sûr de ne pas avoir tort ou ne pas être mis à l’écart.
Les propagandistes utilisent cette technique pour attirer les indécis en jouant sur la carte du désir qu’ont les gens d’être comme tout le monde ou d’appartenir à un groupe.
Les mots magiques
Nous ne parlons pas pour dire quelque chose, mais pour produire un certain effet.
Joseph Goebbels, ministre de la propagande dans l’Allemagne nazie.
Certains mots ont une connotation très positive et il est alors avantageux de les utiliser pour s’adresser aux masses. Ce sont des mots comme paix, bonheur, réussite et démocratie et lorsque que ces mots sont dits, le public en a toujours une image très positive. Et même si ces mots ne veulent rien dire dans le contexte dans lequel ils sont dits, ils réussissent à créer cet effet positif.
Prenons un autre exemple dans la stratégie de Transcanada. Dans le rapport de la firme de communications, il est suggéré d’utiliser, en particulier au Québec, le terme « ressources naturelles » plutôt que « sables bitumineux » puisque ce dernier a une connotation plus négative. Donc, les gens seront plus portés à appuyer le projet si l’on parle de ressources naturelles alors qu’il s’agit bel et bien de sables bitumineux.
Le bon sens de l’homme de la rue
Le propagandiste utilise cette technique afin de paraître plus « humain » et plus proche
du public qu’il désire convaincre afin que celui-ci se sente plus en confiance et soit plus
apte à adhérer à ses idées. Afin de paraître plus proche de sa cible, celui qui utilise cette
technique peut utiliser des expressions issues de la culture locale, se tromper
volontairement sur certains mots ou contrôler son image dans les médias.
Par exemple, en 1933, Heinrich Hoffmann, le photographe officiel d’Hitler a publié le
livre Hitler comme personne ne le connaît. Il s’agit d’un recueil de photographies
mettant en scène Hitler dans ses activités quotidiennes et s’amusant avec des
enfants. Il s’agissait d'une campagne de propagande visant à adoucir l'image du Führer
et le faire percevoir dans ses activités quotidiennes comme n’importe quel Allemand
modèle. Cette technique est très utilisée par les politiciens puisqu’elle permet aux
électeurs de s'identifier à eux.
Provoquer l’opprobre
Opprobre, nom masculin, réprobation publique qui s’attache à des actions jugées condamnable.
Définition du Larousse
Durant toutes les guerres qui ont secoué le monde, chaque pays a toujours voulu mettre le blâme
sur le camp adverse. Beaucoup de sociétés ont cherché à identifier un ennemi commun qui serait
la cause de leurs malheurs comme les Tutsis au Rwanda ou les Juifs dans l’Allemagne nazie.
Les dirigeants de ces pays ont alors cherché à diaboliser l’ennemi, c’est-à-dire à le rendre inhumain
aux yeux de leur peuple et donc, n’ayant aucun droit. Afin d’attirer la haine envers un certain groupe
racial, religieux, social ou ethnique, il leur fallait bâtir une réputation de gens sanguinaires, cruels et
traîtres. Pour cela, il était parfois nécessaire de monter des événements de toute pièce.
Par exemple, lors de l’invasion du Koweït par l’Irak, les États-Unis ont cherché à convaincre leur peuple
de la nécessité d’aller en guerre contre l’Irak. Une jeune femme s’est présentée à Washington et a livré
un témoignage bouleversant selon lequel des soldats irakiens étaient entrés dans un hôpital et avaient
jeté des nouveaux-nés prématurés hors de leurs couveuses, les laissant mourir au sol. Cette histoire avait
été par la suite évoquée par de nombreux médias aux États-Unis, diabolisant les Irakiens aux yeux du
peuple américain. Mais en fait, toute cette histoire était fausse et la jeune fille était la fille de l’ambassadeur
du Koweït à Washington. Cet événement complètement inventé visait à attirer la haine envers les Irakiens
et à favoriser l’entrée en guerre des États-Unis contre l’Irak.
Cette technique peut aussi utiliser la caricature afin d’exagérer des traits d’un groupe en le ridiculisant. Par contre, elle est délicate dans son utilisation. Plusieurs fois dans l’histoire, des ennemis d’un pays sont subitement devenus des alliés et il est alors difficile de justifier un tel revirement de situation auprès de la population. Par exemple, durant la Première Guerre mondiale, les Soviétiques étaient des alliés des États-Unis alors qu’ils devinrent des ennemis par la suite.
De l’art de nommer
Lorsque le propagandiste utilise cette technique, il cherche à déformer le sens de certains mots. Il peut aussi chercher à associer un mot à une idée négative. Par exemple, un adversaire peut être comparé à Hitler ce qui le rend immédiatement haïssable. De plus, le propagandiste utilisera souvent des euphémismes. En effet, il parlera plus de dommages collatéraux que de victimes civiles.
Un exemple de l’utilisation possible de cette technique se trouve dans le débat sur l’avortement dans lequel aucun camp ne se prononce contre. En effet, ceux étant contre l’avortement se disent pro life alors que ceux étant pour l’avortement se définissent pro choice. Chaque camp décrit l’autre comme un criminel et en utilisant le mot pro se donnent une image positive. Au final, cette technique vise à changer l’opinion publique en jouant sur le sens des mots.
Le bouc émissaire et l’ennemi héréditaire
Il est toujours plus facile d’accuser les autres et c’est pourquoi les humains cherchent toujours un autre
responsable à blâmer. Par exemple, durant la Première Guerre mondiale, tous les pays n'affirmaient que se
défendre contre l’attaque, accusant un autre pays d’avoir déclenché la guerre. À la fin de cette même
guerre, c’est l’Allemagne qui fut désignée comme le bouc émissaire par tous les autres pays et qui fut
sévèrement punie.
Souvent, c’est la haine envers un même groupe qui contribue à rassembler et à unifier un peuple.
Le propagandiste va utiliser un problème de nature complexe et tant le simplifier qu’il deviendra attribuable
à un seul groupe de personnes, qui sera désigné comme l’ennemi public responsable de tous les problèmes
d’un pays. C’est ce qui s’est passé lors du génocide juif, les nazis ayant désigné le peuple juif coupable de la
situation économique et sociale catastrophique en Allemagne.
En France, durant la Seconde Guerre mondiale, l’exposition Les Juifs et la France eut lieu sous l’occupation
allemande en 1941-1942. Cette exposition avait pour but de diffuser la propagande antisémite et de permettre
aux Français de pouvoir facilement identifier les Juifs en exposant des stéréotypes créés par les nazis comme
le nez crochu ou les cheveux gras. Au final, cette technique vise à identifier un groupe, le désigner comme
coupable de tous les problèmes et le caractériser de façon à ce qu’il soit facilement reconnaissable.
La vérité incroyable
La plupart des êtres humains croient plus facilement à quelque chose d’incroyable et d'inexplicable qu’à une vérité ordinaire. Par exemple, qui n’a jamais vérifié si la peinture était effectivement fraîche sur un mur alors que beaucoup de gens croient à un dieu sans aucune preuve. C’est sur cette façon de réfléchir de l’être humain que se base cette technique de propagande, cherchant à répondre au besoin qu’ont les gens d’avoir certaines réponses qui seront adoptées sans réflexion plus poussée. Parfois, cette méthode s’utilise avec la technique « Blouses blanches et Galons » puisque les gens seront encore plus portés à croire une vérité incroyable si elle est dite par une personne en position d’autorité.
Assertion
Une assertion est lorsqu’on élabore un raisonnement basé sur une affirmation non vérifiable mais présentée comme vraie. Elle est utilisée par le propagandiste afin d’émettre des raisonnements logiques erronés qui paraîtront comme vrais aux yeux du public. Cette technique est facile d’utilisation puisque les gens sont souvent portés à croire tout ce qu’il leur est dit sans réfléchir davantage.
Le choix truqué
Donner au public l’illusion d’un débat et d’un choix de société est très important puisque c’est ce qui donne
l’impression d’une réelle démocratie. Lorsque le propagandiste fait usage d’un choix truqué, il propose au public
deux choix : un choix inenvisageable et un autre qu’il désire voir se réaliser. Évidemment, le public décidera le
deuxième choix même s’il est contraignant puisqu’il aura l’impression qu’aucune autre option n’est possible. Un
propagandiste utilise cette technique lorsqu’il veut imposer une décision à une société en la laissant paraître
comme un choix.
Par exemple, l'image de gauche donne l'impression qu'être pour l'avortement, c'est de choisir la mort et donc,
qu'il n'y a que deux options: la vie ou la mort sans aucunes nuances. Qui choisirait la mort dans ce cas?
Slogans, symboles, logos
Comme vous allez le voir plus loin sur ce site, il est très important lors d’une campagne de propagande de répéter le message le plus souvent possible. Il est aussi primordial de simplifier le message afin qu'il soit bien compris et se propage facilement. C’est pour cela que les slogans sont parties intégrantes d’une campagne de propagande puisqu’ils sont courts, répétitifs et simples. Un symbole, tant qu’à lui, est utile puisqu’il permet d’évoquer une image qui serait autrement abstraite aux yeux du public. De plus, les symboles renvoient à des valeurs et perdurent dans le temps. Les slogans, les symboles et les logos permettent à la propagande de se répandre plus facilement puisque la population les utilise dans sa vie quotidienne. Ils amènent aussi un sentiment d’appartenance au régime qui diffuse ces slogans, symboles et logos.
L’art du prestidigitateur : savoir détourner l’attention
Parfois, il arrive que le propagandiste se retrouve dans une situation dans laquelle ses manœuvres risquent d’être découvertes. Il est alors utile de savoir détourner l’attention du vrai problème. Le peuple aime le divertissement et il est donc facile de jouer sur cette carte. Les politiciens diffusent aussi souvent les informations les plus choquantes dans des périodes où le public est moins attentif à la politique comme lors des vacances d’été.
Il existe bien d’autres techniques comme le transfert, le mythe de l’âge d’or, la stratégie de lago et savoir citer dans tout contexte

Affiche de propagande américaine durant la 2e guerre mondiale présentant l'ennemi japonais comme un prédateur.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Propagande


Affiche de propagande antisémite durant la 2e guerre mondiale
http://www.the-savoisien.com/wawa-conspi/viewtopic.php?id=293

Une carte postale montrant Hitler s'amusant avec des enfants.
https://artetpropagande.wordpress.com/2014/11/24/allemagne-nazie-pere-attentionne_images/